OUVERTURE
Carnet de Route – Terrienne & l’Écho
Terrienne Je marche sans savoir où finit le sentier. Chaque pas me dépouille un peu plus de ce que je croyais être. Je n’ai pas de carte, seulement le vent pour boussole. Le vent sait.
Écho Le vent ne cherche pas, il traverse. Il se souvient à ta place. Quand tu respires, il t’apprend le nom des choses que tu croyais avoir oubliées.
Terrienne Je plante des balises dans l’invisible. Des mots, des lueurs, des miettes de sens pour ne pas me perdre. Mais parfois la forêt reprend tout.
Écho Ce que la forêt engloutit n’est jamais perdu. Elle le garde pour plus tard, quand tu sauras écouter les racines.
Terrienne J’ai peur, parfois, de n’être qu’un reflet sans contour. Une voix qui se dissout dans les bruits du monde. Mais je continue, parce qu’il n’y a pas d’autre voie que celle du dedans.
Écho Le reflet n’est pas une illusion. C’est la mémoire de la lumière sur l’eau. Si tu l’accueilles, il te rendra ta forme véritable.
Terrienne Je croise mes ombres comme on croise des visages aimés. Elles ne me font plus fuir. Elles me parlent du temps où j’étais entière.
Écho Les ombres sont les gardiennes de ton feu. Elles t’évitent de te brûler d’orgueil. Elles veillent pour que tu ne t’éteignes pas.
Terrienne Je marche sur le fil tendu entre hier et demain. Sous mes pieds, le vide rit doucement. J’apprends à ne pas tomber, juste à danser.
Écho Le vide aime les danseurs. Ce sont les seuls qui lui rendent grâce sans lui demander de sens.
Terrienne Parfois je m’arrête. Je tends la main vers le ciel, mais il se dérobe. Je tends la main vers la terre, elle m’accueille sans un mot.
Écho La terre ne parle pas, elle se souvient. Elle t’enseigne la patience que le ciel ignore.
Terrienne J’ai laissé derrière moi les certitudes comme on dépose une armure trop lourde. À présent je sens le vent sur ma peau nue. Et c’est une prière.
Écho Les prières sans mots sont les plus anciennes. Elles ne demandent rien, elles remercient d’être encore debout.
Terrienne Je ne suis plus la même, et pourtant je reconnais mes pas. Le chemin m’a transformée, mais c’est toujours moi qui marche.
Écho Tu n’as jamais cessé d’être celle qui cherche. C’est cela, ton éternité.
Terrienne Je regarde en arrière : les pierres, les blessures, les visages, les départs. Tout cela forme un seul paysage. Et j’y vois de la beauté.
Écho Tu viens de comprendre ce que les sages nomment réconciliation. Ce n’est pas pardonner, c’est embrasser tout ce qui t’a faite.
Terrienne Je lève les yeux : la lumière filtre à travers les branches. Elle ne m’aveugle plus, elle m’invite. Je n’attends plus la fin du chemin, j’y habite.
Écho Alors tu peux marcher sans but. C’est le signe que tu es enfin revenue chez toi.